Séminaire

Dernières nouvelles du collapse : revue d'actualité scientifique

23 décembre 2024

Compte rendu du séminaire du 14 septembre 2024

L'apocalypse serait-elle devenue un sujet d'étude aussi banal que la photosynthèse ou les fractales ? Ces deux dernières décennies, le vocabulaire de la fin du monde s’est métamorphosé en un champ lexical scientifique florissant. Des concepts comme l’anthropocène ou les planetary boundaries ont proliféré dans les revues académiques. Des notions plus anciennes comme la polycrise d’Edgar Morin et le collapse ont resurgi récemment, transcendant les frontières disciplinaires, tandis que les cascading failures, les wicked problems ou les compound risks sont devenus incontournables dans l’analyse des risques.

Cette explosion terminologique n’est pas qu’un jeu sémantique. Loin d’être de simples abstractions, ces innovations conceptuelles et heuristiques façonnent notre compréhension collective des défis critiques de notre époque. Le concept de tipping points, par exemple, a radicalement transformé notre vision du changement climatique, le faisant passer d’un processus linéaire à une menace de basculements brusques et irréversibles. Au-delà de leurs portées analytiques, ces avancées catalysent la formation de communautés de pensée croisant sciences exactes et sciences humaines et sociales. Elles stimulent également l'allocation de ressources, motivent des lobbies et influencent l'élaboration des politiques publiques.

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Introduction

Entre les étés 2023 et 2024, treize mois consécutifs de températures records1 ont propulsé le système climatique dans un « territoire inconnu »2, plaçant l'humanité et la biosphère « au bord d'un désastre irréversible »3. La majorité des auteurs du GIEC eux-mêmes doutent à présent de notre capacité à maintenir le réchauffement sous les seuils définis par les Accords de Paris4.

Les récentes observations de la circulation méridienne de retournement de l'Atlantique (AMOC) amplifient ces inquiétudes5. Ce mécanisme océanique, crucial pour la régulation du climat mondial, se dérègle plus rapidement que prévu. Il constitue une incertitude critique. Bien que son évolution exacte demeure imprévisible, son impact pourrait être catastrophique. Plus alarmant encore, cet effondrement de la stabilité climatique n'est qu'une des multiples manifestations d'un système Terre aux limites de ses équilibres : six des neuf frontières planétaires sont désormais franchies6.

Aujourd'hui, les perturbations se propagent et s'intensifient à travers de multiples dimensions - écologiques, sociales, économiques, sanitaires et démocratiques. La convergence de ces crises crée une « polycrise » globale qui force la communauté scientifique à renouveler continuellement ses approches7..

Si le vocabulaire de l'« apocalypse » a longtemps dominé le débat, les années 1950 ont marqué l’émergence de concepts pionniers tels que le pic du pétrole, l’hiver nucléaire, l’overshoot ou les limites à la croissance (voir annexe 1). Ces notions ont permis de mettre en lumière l’origine anthropique des menaces pesant sur notre avenir, écartant les visions mystiques pour ouvrir la voie à une compréhension rationnelle et mesurable des défis planétaires.

Depuis les années 2000, cette dynamique conceptuelle s’est accélérée, avec l’apparition de termes-clés comme anthropocènefrontières planétaires et points de bascule (tipping points). Ces notions, devenues centrales, esquissent un monde au bord de l’instabilité, où les pressions humaines érodent chaque jour un peu plus les équilibres naturels et sociaux.

Parallèlement, des concepts plus récents comme global systemic risksexistential risks ou cascading failures traduisent une volonté d'explorer les enjeux sous différents angles. Le systemic risk examine les menaces pesant sur des systèmes entiers, tandis que l’existential risk se concentre sur les scénarios extrêmes mettant en péril la survie même de l’humanité. Le cascading failure, quant à lui, illustre comment une défaillance initiale dans un système — comme une crise financière ou une rupture d’approvisionnement énergétique — peut provoquer des effets domino à travers d’autres systèmes interconnectés, amplifiant l’ampleur et la gravité des crises.

Ainsi, ces outils conceptuels et méthodologiques permettent non seulement de cartographier les interactions systémiques, du local au global et du court au long terme, mais aussi de révéler les points de fragilité, les leviers d’action ou des principes de gouvernance encore insoupçonnés. En révélant les interconnexions entre des crises autrefois perçues comme isolées, ces approches traduisent une volonté croissante de dépasser les analyses linéaires pour appréhender un monde marqué par l’imprévisibilité et la multiplicité des crises.

Dans ce paysage, le terme collapse s'est progressivement imposé comme un concept incontournable. Entre 2000 et 2023, les publications intégrant ce terme ont connu une croissance remarquable : de moins de 50 contributions par an avant 2010, leur nombre est passé à près de 200 en 2020, soit une croissance annuelle moyenne de 35% (voir annexe 2). Au total, 1485 publications mobilisent explicitement ce concept8.

Ce compte-rendu du séminaire s'articule en quatre parties complémentaires. Il débute par une analyse des principales synthèses scientifiques qui cartographient ce champ d'étude, se poursuit par l'examen des nouvelles méthodologies - en particulier les modèles prédictifs -, puis explore l'apport des ouvrages académiques récents et le rôle des centres de recherche spécialisés. Cette organisation permet d'explorer non seulement les connaissances produites, mais aussi la façon dont la communauté scientifique s'organise pour comprendre et anticiper les transformations majeures. Au terme de ce parcours, il apparaîtra que les études sur l'effondrement, loin de se cantonner à une approche purement quantitative ou qualitative, évoluent vers une plus grande réflexivité. Cette maturité croissante du domaine s'accompagne d'un potentiel émancipateur inattendu, même si certains angles morts persistent comme l'absence d'une coordination internationale structurée.

Les revues de littérature : structuration et cartographie d'un champ dynamique

Face à l'accélération des crises globales, les études sur l'effondrement sociétal (collapse studies) connaissent une expansion remarquable. Les revues de littérature, loin d'être de simples compilations, jouent un rôle fondamental dans l'organisation et la structuration des connaissances. En cartographiant systématiquement les recherches sur les mécanismes de transformation et d'adaptation des sociétés, elles permettent d'établir des ponts cruciaux entre l'analyse des effondrements passés et la construction de réponses aux défis contemporains.

Principaux axes thématiques dans les recherches récentes

Une revue de littérature récente analyse 361 articles et 73 ouvrages académiques sur le sujet9. Elle identifie cinq conversations scientifiques majeures structurant aujourd'hui le domaine : l'étude des effondrements historiques, qui examine en détail les sociétés disparues ; l'élaboration de théories générales, qui cherche à développer des cadres explicatifs globaux ; l'exploration des alternatives à l'effondrement, qui analyse les trajectoires de résilience ; l'étude des récits fictionnels, qui explore l'impact des représentations culturelles des effondrements ; et enfin, l'analyse des liens entre changement climatique et risques d'effondrement sociétal.

Ces cinq conversations scientifiques se nourrissent mutuellement et produisent un réseau dense de nouveaux savoirs. L'étude empirique des effondrements passés alimente directement l'élaboration des théories générales, tandis que l'exploration des alternatives s'appuie sur ces deux premiers axes pour identifier des leviers d'action. Les récits fictionnels, loin d'être déconnectés de la recherche, influencent la perception des risques et donc les réponses sociétales envisagées. Quant à l'analyse du lien entre changement climatique et effondrement, elle bénéficie des apports de toutes les autres conversations, tout en leur apportant une nouvelle perspective critique.

L'évolution du concept

Les premiers textes sur l'effondrement de sociétés se concentraient essentiellement sur une vision binaire : une société était soit stable, soit en effondrement. Cette approche, directement inspirée des études historiques ou archéologiques traditionnelles, définissait principalement l'effondrement comme la fin brutale d'un système politique centralisé. Cependant, ces interprétations, bien qu'ayant posé les bases de la réflexion, se sont révélées trop rigides pour rendre compte de la diversité des effondrements historiques. Face à cette limite, les chercheurs ont progressivement développé des cadres d'analyse plus nuancés, capables de saisir les multiples facettes de ces processus complexes10.

Cette analyse plus fine des processus d'effondrement trouve un écho dans la proposition récente de redéfinition de ce concept comme une « réduction de la capacité collective entraînant une perte généralisée et difficilement réversible des fonctionnalités de base d'une société »11. Cette nouvelle approche apporte plusieurs clarifications essentielles.

D'abord, elle établit un lien direct entre durabilité et prévention de l'effondrement. En définissant la durabilité comme la capacité à maintenir les fonctions essentielles d'une société sur le long terme, et l'effondrement comme une réduction de cette capacité, cette approche montre que ces deux notions sont les faces d'une même pièce. Promouvoir la durabilité, par exemple en transitant vers des systèmes socio-économiques plus résilients et adaptés aux contraintes environnementales, devient alors un moyen de prévenir l'effondrement. Inversement, les modèles de développement non durables, même s'ils semblent bénéfiques à court terme, augmentent en réalité le risque d'effondrement à long terme.

Ensuite, cette nouvelle définition nuance le lien entre effondrement sociétal et défaillance de l'État. Si l'incapacité de l'État à subvenir aux besoins fondamentaux de la population est un signe majeur d'effondrement, une société peut, dans une certaine mesure, persister malgré l'effondrement de son gouvernement. La résilience d'une société dépend donc aussi de la robustesse de ses structures sociales et de sa capacité d'auto-organisation.

Les dimensions temporelles et spatiales des effondrements prennent également une place croissante dans l'analyse. Les recherches contemporaines révèlent que les transformations sociales suivent souvent des trajectoires graduelles plutôt que soudaines12. La civilisation mycénienne en offre une illustration saisissante : si les bouleversements politiques ont été rapides, les répercussions sociales et culturelles se sont déployées sur plusieurs générations13, donnant corps au concept de « slow collapse »14. L'échelle spatiale s'avère tout aussi déterminante : l'effondrement de l'Égypte antique démontre comment une catastrophe à l'échelle nationale peut paradoxalement stimuler des dynamiques positives locales, la fragmentation du pouvoir central ayant catalysé une redistribution des richesses et l'émergence de cultures régionales florissantes15.

Cette évolution conceptuelle s'accompagne naturellement d'une transformation profonde des méthodes d'analyse, rendant nécessaire une approche plus intégrée des différentes disciplines.

Le renouveau méthodologique et l'interdisciplinarité

L'étude des effondrements génère un volume croissant de données et de connaissances qui dépassent les capacités d'analyse d'une approche mono-disciplinaire traditionnelle. Face à ce défi, l'interdisciplinarité s'est progressivement imposée comme une nécessité fondamentale. Cette transformation mobilise un large éventail de disciplines : histoire, archéologie, anthropologie, sciences du climat, économie écologique, philosophie et sciences des systèmes16.

L'intégration des disciplines se heurte à plusieurs obstacles majeurs. Les différences méthodologiques, doublées des tensions théoriques entre écoles de pensée, rendent complexe toute tentative de synthèse. Un fossé persiste notamment entre les modèles mathématiques, en quête de points de basculement précis, et l'analyse historique qui révèle des transformations plus graduelles. Cette divergence soulève la question fondamentale de notre capacité à prédire les effondrements systémiques. Les recherches sur les Pueblos anciens en offrent une parfaite illustration : quand l'archéologie traditionnelle interprétait la fin de leur civilisation comme un simple « abandon » des sites, l'apport des savoirs autochtones et de l'anthropologie a mis en lumière des migrations élaborées, guidées par la quête du  « middle place », le centre cosmologique de chaque communauté17.

Pour surmonter ces obstacles, de nouveaux outils méthodologiques émergent. Le projet TERRA, par exemple, développe une approche semi-automatisée combinant expertise humaine et intelligence artificielle pour faciliter l'interconnexion des savoirs18. Cette méthode permet non seulement d'identifier plus efficacement les publications pertinentes mais aussi de déceler des connexions inattendues entre différents domaines de recherche.

L'ensemble de ces avancées théoriques et méthodologiques nourrit le développement de ce que l'archéologue Guy Middleton nomme la « collapsologie appliquée » (applied collapsology)19. Cette approche mobilise les enseignements du passé et les nouvelles méthodologies pour éclairer les politiques publiques contemporaines. Elle soulève cependant une question cruciale : comment appréhender concrètement ces interactions entre systèmes sociaux et environnementaux ? Comment tester nos hypothèses sur ces transformations profondes qui peuvent affecter des sociétés entières ?

C'est précisément pour répondre à ces questions que la modélisation s'est progressivement imposée comme un outil complémentaire essentiel. Elle ouvre la voie à une nouvelle approche, plus quantitative, de ces phénomènes sociétaux complexes.

Les modèles : Comprendre et anticiper les effondrements

L'alliance entre histoire et technologie a révolutionné l'étude des dynamiques d'effondrement. Les simulations informatiques permettent désormais d'observer en temps réel les interactions entre variables sociales, économiques et environnementales. Cette évolution qui a débuté dès les années 1970 avec le modèle WORLD3 du Club de Rome, s'appuie désormais sur un accès sans précédent à des masses de données : des archives climatiques aux flux énergétiques en passant par les migrations globales.

Quatre familles d'outils complémentaires ont émergé : les modèles basés sur les agents qui simulent les comportements collectifs, les modèles à faible dimension qui isolent les mécanismes clés, les modèles globaux intégrés qui cartographient les interactions systémiques, et l'analyse mathématique des cycles historiques20.

Des individus aux sociétés : modèles multi-agents

Parmi ces approches, les modèles basés sur les agents (Agent-Based Models, ABM) se distinguent par leur capacité à simuler les interactions entre de multiples agents autonomes - qu'il s'agisse d'individus, de familles ou de communautés21. Ils permettent d'observer comment les comportements individuels locaux génèrent des effets à grande échelle, offrant ainsi un nouvel angle pour tester des hypothèses sur les mécanismes d'effondrement.

Ces modèles ont d'abord prouvé leur valeur dans la modélisation des dynamiques historiques22. L'étude des Ancêtres Pueblos, qui vivaient dans les régions arides des plateaux canyons du sud-ouest des États-Unis, est particulièrement éclairante : en simulant l'interaction entre données climatiques, pratiques agricoles et réseaux d'échanges, ces modèles ont permis de reconstituer des stratégies d'adaptation sophistiquées, démontrant la cohérence entre les choix de déplacement et la préservation des structures sociales traditionnelles23.

Cette capacité à modéliser des systèmes sociaux-écologiques trouve aujourd'hui des applications cruciales dans l'analyse des risques contemporains. Ainsi, l'application des ABM à l'économie mondiale a confirmé un risque majeur formalisé sous le concept de « Point Critique de Défaillance en Cascade » (CFCP)24. Ce seuil révèle comment des perturbations affectant des liens économiques apparemment ténus - comme les échanges commerciaux peu visibles entre l'Afrique subsaharienne et l'Amérique du Sud - peuvent déclencher des réactions en chaîne dévastatrices à l'échelle globale.

Capturer l'essentiel : modèles dynamiques simplifiés

Là où les ABM excellent à révéler les dynamiques émergentes, les modèles dynamiques à faible dimension (LDM) cherchent à identifier les mécanismes fondamentaux. En se concentrant sur un nombre limité de variables clés, ils sacrifient délibérément certains détails pour mettre en lumière des motifs essentiels qui resteraient masqués dans des systèmes plus complexes.

Le modèle HANDY (Human And Nature DYnamics) démontre la puissance de cette approche minimaliste. En modélisant simplement l'interaction entre stratification sociale et exploitation des ressources, il a révélé comment les inégalités peuvent accélérer l'effondrement d'une société, même technologiquement avancée25. Les mises à jour récentes du modèle, intégrant l'innovation technologique et les contraintes climatiques, confirment ce rôle amplificateur des inégalités dans les crises systémiques26.

Les travaux récents utilisant cette approche ont révélé un phénomène paradoxal : certaines sociétés peuvent s'enfermer dans des trajectoires de déclin auto-entretenu, persistant dans des comportements autodestructeurs même lorsque leurs coûts deviennent manifestement insupportables. Ce phénomène, résultant de mécanismes de rétroaction sociale et économique, suggère que plus une société s'engage dans une voie non durable, plus il lui devient difficile d'en changer27.

Penser les systèmes : modèles globaux intégrés

Si les modèles dynamiques à faible dimension isolent des mécanismes spécifiques, les modèles globaux intégrés (IGM) cherchent à intégrer les principales interactions entre systèmes sociaux, économiques et environnementaux. Cette vision holistique a posé les bases conceptuelles de l'analyse des risques systémiques28.

Le modèle WORLD3 reste l'archétype de cette approche. En analysant les interactions entre population, production alimentaire, industrialisation, pollution et ressources non renouvelables, il a produit la première simulation quantitative globale des limites à la croissance. Sa conclusion, alors controversée mais depuis largement validée29, était qu'une croissance infinie dans un monde fini mènerait inévitablement à un dépassement puis à un effondrement systémique.

Sa dernière calibration, enrichie par cinquante années de données supplémentaires (1970-2020), livre des conclusions encore plus alarmantes que le modèle initial. Non seulement nos sociétés suivent les trajectoires d'effondrement prédites en 1972, mais elles s'alignent sur le scénario initial le plus pessimiste, plutôt que sur le scénario optimiste qui supposait un doublement des ressources disponibles et des technologies de recyclage avancées. Un point de basculement pourrait ainsi survenir dès la prochaine décennie30.

Les rythmes de l'histoire : cycles et prédictions

Au-delà de la complexité capturée par les IGM, la cliodynamique ajoute une dimension temporelle unique à l'étude des effondrements. En combinant modélisation mathématique et analyse massive de données historiques, elle transforme des récits historiques complexes en variables quantifiables, révélant des motifs récurrents dans l'évolution des sociétés31.

L'analyse de 10 000 ans d'histoire à travers 700 sociétés a permis d'identifier des cycles d'intégration-désintégration remarquablement réguliers, d'environ 200-300 ans. Ces cycles, caractérisés par des phases successives d'expansion sociale, de multiplication des élites et de compétition croissante, culminent souvent dans des périodes de désintégration politique32.

La puissance prédictive de cette approche s'est révélée de façon saisissante avec l'anticipation des troubles sociaux des années 2020. Dès 2010, l'analyse des tendances structurelles - inégalités, polarisation politique, endettement - permettait de prévoir une période majeure d'instabilité33. Le journal académique dédié à cette approche continue d'enrichir ces modèles en intégrant des variables contemporaines comme l'impact des réseaux sociaux sur la polarisation politique ou les effets du changement climatique sur la stabilité sociale34.

L'analyse comparée de ces approches de modélisation révèle leur complémentarité : les ABM excellent à éclairer les dynamiques émergentes, les LDM à identifier les mécanismes fondamentaux, tandis que les IGM proposent une vision systémique globale que la cliodynamique enrichit d'une profondeur historique inédite.

Cependant, malgré leur sophistication croissante, ces modèles mathématiques ne peuvent seuls appréhender toute la complexité des transformations sociétales35. La réorganisation des systèmes, leur adaptation ou leur effondrement soulèvent des questions fondamentales : quelle est la nature profonde de ces changements ? Pouvons-nous réellement les anticiper ou les influencer ? Quelles sont leurs implications éthiques et sociales ? Pour éclairer ces interrogations, une nouvelle génération de chercheurs propose des analyses qualitatives à travers une production académique foisonnante, comme nous allons le voir dans la section suivante.

Les livres : Baromètres des tendances

L’exploration de la complexité ne se limite pas aux outils quantitatifs. Les approches qualitatives connaissent également un essor significatif, comme en témoigne la multiplication des publications d'auteurs universitaires.

Notre analyse de 66 ouvrages publiés entre 2020 et 2024 met en lumière la grande diversité des réflexions critiques qui agitent désormais les débats académiques autour des crises permanentes et multiples36. Au-delà d'un simple reflet des anxiétés collectives, ces contributions proposent de nouvelles grilles de lecture. Cinq grandes tendances se dessinent.

Un changement de perspective

La première de ces tendances concerne le ton même des publications, qui marque une inflexion notable dans le traitement des enjeux planétaires. Aux approches distanciées et analytiques qui dominaient jusqu'alors succède un discours plus direct et incisif. Des ouvrages comme Fatal Species37Angry Earth38 ou Hot House Earth39 signent l'abandon de la posture de l'observateur neutre au profit d'une affirmation claire de l'urgence d'une réponse face aux bouleversements en cours.

Dans cette même évolution du ton, plusieurs ouvrages abordent la situation actuelle non plus comme une menace future mais comme une transformation déjà engagée. L'ouvrage Biosecurity, Economic Collapse, the State to Come40 analyse les mutations profondes de l'État à travers la gestion de la pandémie, démontrant l'émergence d'une nouvelle forme de gouvernance déjà opérante. Dans cette même perspective, The Resilient Apocalypse41 déplace la question de la prévention vers celle de l'adaptation, établissant les récits apocalyptiques comme des ressources pour penser et construire la résilience collective.

Une éthique de la fin

La deuxième tendance marque l'émergence d'une « éthique de la fin ». Philosophy for an Ending World42 en pose les fondements théoriques, proposant une philosophie de l'action adaptée à un monde aux horizons réduits. L'ouvrage développe notamment une éthique intergénérationnelle qui repense nos systèmes de valeurs face à la finitude.

Human Extinction43 approfondit cette réflexion en explorant les dimensions éthiques d'une potentielle extinction de l'humanité. L'ouvrage ne se contente pas d'analyser ce scénario extrême : il en fait le point de départ d'une refonte de nos priorités individuelles et collectives, proposant un cadre éthique inédit pour orienter l'action dans l'incertitude.

Pour compléter cette perspective, Catastrophic Thinking44 apporte un éclairage historique essentiel en retraçant l'évolution de notre rapport à l'extinction, de Darwin à l'Anthropocène. Cette généalogie de la pensée catastrophique enrichit le débat contemporain et ancre nos questionnements actuels dans une tradition intellectuelle plus large.

La résurgence du spirituel

La troisième tendance montre comment la perspective de l'effondrement transforme profondément notre rapport au spirituel, qu'il s'agisse de déconstruire les traditions religieuses ou de forger de nouvelles alliances entre sacré et engagement politique.

Theology for the End of the World45 développe une critique profonde du rôle du christianisme dans l'émergence des systèmes de domination actuels. Plutôt que de chercher à "sauver le monde" ou à réhabiliter une version vertueuse du christianisme, l'ouvrage invite à reconnaître comment cette religion a façonné le capitalisme, le racisme et le patriarcat. Il suggère d'abandonner toute tentative de rédemption d'un ordre social fondé sur la violence et l'exploitation, pour mieux accepter et accompagner sa fin.

Political Spirituality in the Face of Climate Collapse46 approfondit cette voie en développant le concept d'écospiritualité civique. En puisant dans les sagesses des peuples premiers tout en dépassant les cadres de pensée occidentaux, l'ouvrage établit un pont inédit entre spiritualité et engagement politique. Cette approche ouvre de nouvelles perspectives pour mobiliser les consciences au-delà des clivages idéologiques traditionnels face à la crise écologique.

La politisation du discours

La quatrième tendance met en lumière la dimension fondamentalement politique de l'effondrement. The Genocide-Ecocide Nexus47 bouleverse notre compréhension des mécanismes de destruction massive. À travers une analyse comparative de multiples régions du globe, l'ouvrage révèle comment la dégradation des milieux naturels s'articule avec l'oppression systématique de populations entières. Cette grille de lecture inédite permet de repenser les notions de crime environnemental et de violence politique comme deux faces d'un même processus.

Cette lecture politique s'enrichit avec Global Burning: Rising Antidemocracy and the Climate Crisis48, qui analyse la montée simultanée du dérèglement climatique et des régimes autoritaires. L'auteure décrypte les stratégies des mouvements anti-environnementaux, devenus des leviers majeurs de conquête du pouvoir. Au-delà d'une simple analyse des politiques climaticides, l'ouvrage décortique les mécanismes par lesquels cette crise nourrit le basculement démocratique de nombreuses sociétés.

En contrepoints de ces constats, Breaking Together49 développe une vision écolibertarienne de notre avenir. Plutôt qu'un renforcement du contrôle étatique, l'ouvrage défend une approche fondée sur l'autonomie locale et la liberté d'initiative. En s'appuyant sur de nombreux exemples concrets, il montre comment des communautés auto-organisées peuvent développer leur résilience tout en régénérant leurs écosystèmes, esquissant ainsi une alternative aux solutions autoritaires de la crise.

Vers une transdisciplinarité créative

La cinquième tendance dessine les contours d'une nouvelle approche décloisonnée des savoirs. Being a Therapist in a Time of Climate Breakdown50 incarne cette évolution. En fusionnant psychologie clinique, justice climatique et savoirs autochtones, l'ouvrage forge de nouveaux outils conceptuels pour accompagner individus et communautés dans leur adaptation aux bouleversements planétaires. La pratique thérapeutique s'y trouve profondément transformée, intégrant les dimensions écologiques et sociales non plus comme des facteurs externes mais comme des composantes essentielles de la psyché humaine.

Cette transcendance des cadres disciplinaires se poursuit dans Surviving Collapse: Building Community toward Radical Sustainability51. L'auteure y explore les modèles alternatifs de développement durable à travers l'étude comparative d'un écovillage urbain aux États-Unis et d'une ferme urbaine à Cuba. Au-delà d'une simple juxtaposition de cas, l'ouvrage dégage des principes communs, comme l'intégration des savoirs ancestraux, la priorité donnée à l'efficience sociale et écologique plutôt qu'à la rationalité économique, et l'ancrage dans des pratiques low-tech orientées vers la communauté. 

Les Centres : Observatoires des crises globales

Si les livres sont les baromètres intellectuels captant les fluctuations des pressions sociétales et écologiques, les centres de recherche spécialisés fonctionnent comme des observatoires de pointe, scrutant avec une précision inédite les crises à l’horizon. Trois types d’institutions se démarquent nettement : celles surveillant les systèmes terrestres critiques, celles dédiées à l’analyse des risques globaux et à leur gouvernance, et enfin, les observatoires des imaginaires apocalyptiques. Ensemble, elles apportent des visions distinctes mais complémentaires.

Des institutions comme le Stockholm Resilience Center et l'Institut Potsdam pour la recherche sur les impacts climatiques (PIK) se consacrent à la détection des points de basculement. Leur mission : repérer les moindres perturbations qui pourraient annoncer des bouleversements majeurs, comme celles affectant la circulation océanique atlantique, dont les récentes études sur son potentiel collapse sont, pour le dire sans détour, glaçantes52. Ces centres ne se contentent pas de la simple détection. Chaque année, ils publient des rapports pour alerter les décideurs sur les défis qui se profilent53, chaque donnée devenant un signal d’alarme.

Décoder les systèmes critiques

La communauté de recherche sur les risques systémiques globaux de l’Université de Princeton (GSR PIIRS)54 et le Cascade Institute55 enrichissent cette analyse avec une approche qui combine les systèmes sociaux et écologiques. Le PIIRS, pionnier dans ce domaine, a posé les jalons conceptuels avec un article fondateur sur l'interconnexion des risques globaux56. Parmi ses contributions récentes, une étude se distingue en montrant un effet inattendu de la mondialisation : un déclin marqué de la santé mentale, malgré l’amélioration globale de la qualité de vie57. En cause ? Une perte d’autonomie face aux réalités de la vie quotidienne. De quoi alimenter le débat sur le projet de la décroissance, la réappropriation des savoir-faire locaux et la souveraineté alimentaire.

Le Cascade Institute de l’Université Royal Roads s’inscrit dans cette dynamique, mais avec un focus particulier sur les crises convergentes, conceptualisées sous le terme de « polycrise globale »58. L'institut analyse notamment comment des événements soudains (déclencheurs) combinés à des tensions prolongées (stress lent) peuvent déstabiliser des systèmes entiers59. Une approche qui résonne avec l'actualité : la crise climatique s’imbrique désormais avec des crises économiques, sociales et géopolitiques, créant un cocktail explosif.

Penser l'impensable

D'autres centres de recherche s’intéressent aux risques catastrophiques globaux (GCR), ces menaces colossales qui pourraient redéfinir l'existence humaine elle-même. Alors que l’analyse des risques systémiques globaux se concentre sur les interdépendances entre les différents systèmes mondiaux (économique, financier, environnemental, social, etc.), les GCR englobent des dangers encore plus vastes, tels qu'un climatique climatique abrupt, les pandémies incontrôlables ou les catastrophes technologiques, susceptibles de provoquer une destruction massive et irréversible.

Le Centre for the Study of Existential Risk (CSER) de Cambridge est une référence mondiale dans ce domaine. Ses récents travaux sur les scénarios climatiques extrêmes ont secoué la communauté scientifique60. Dans un article marquant, Climate Endgame, Luke Kemp et ses collègues alertent sur des scénarios souvent ignorés par le GIEC, mais de plus en plus probables61. Selon eux, il faut désormais intégrer ces futurs catastrophiques dans les discussions politiques. Kemp et son équipe proposent ensuite un cadre pour explorer ces scénarios via trois approches : la prospective, l’agitation et la fiction62. Si la première se distingue par sa rigueur, elle peut parfois paraître trop simplificatrice. L’agitation, quant à elle, mobilise le public mais peut aussi générer du fatalisme, tandis que la fiction, oscillant entre rigueur et imagination, ouvre des portes vers des futurs hypothétiques, souvent effrayants mais potentiellement évitables.

Le colloque de 2023 sur les risques existentiels à Stanford a amplifié ces préoccupations63. Une idée phare a émergé : la création d’un Panel Intergouvernemental sur les Risques Catastrophiques Globaux (IPGCR)64, écho direct des propositions de Kemp et ses collègues. Inspirée par le modèle du GIEC, cette initiative chercherait à étendre l'analyse à toutes les menaces globales, créant ainsi un pont indispensable entre les diverses approches.

Le Stanford Existential Risk Initiative (SERI)65, organisateur du colloque, analyse en profondeur les menaces liées au bioterrorisme, à la sécurité nucléaire, et à l'IA. Parmi leurs travaux récents, une étude a révélé un péril jusqu'alors sous-estimé. Il s'agit de l'intégration d'agents IA dans les processus décisionnels militaires et diplomatiques de haut niveau. Bien que conçus pour optimiser ces processus, ces systèmes pourraient alimenter des dynamiques de course aux armements66.

Explorer les imaginaires de l'effondrement

Saisir les crises globales ne se limite pas à une analyse technique froide. Il est aussi essentiel de comprendre comment ces menaces sont perçues et vécues par les sociétés. Le Centre Käte Hamburger pour les études apocalyptiques et post-apocalyptiques (CAPAS)67 de l'Université de Heidelberg se distingue par une approche transdisciplinaire. Ce centre explore comment les ruptures sociétales et écologiques, et leurs suites imaginées, peuvent paradoxalement générer des dynamiques « émancipatrices et créatives » .

Chaque année, le CAPAS invite des chercheurs du monde entier pour une collaboration intense, avec un accent particulier sur les dynamiques entre l’Europe, l’Amérique latine et l’Asie. Ce dialogue nourrit une réflexion riche sur des futurs alternatifs, où temporalités non linéaires et visions plurielles du monde se croisent. Avec sa revue académiqueApocalyptica68 et son magazine Apocalypse Quaterly69, il crée un espace de dialogue unique entre les différents points de vue. Ses événements culturels (projections de films, festivals, pièces de théâtre, expositions) viennent enrichir les débats théoriques, unissant art et science pour explorer de nouvelles voies.

Conclusion

Ce compte-rendu du séminaire, initié dans un contexte d'urgence climatique sans précédent, montre comment la recherche s'organise face à la convergence des crises. La notion d'effondrement, d'abord cantonnée au vocabulaire apocalyptique, s'est progressivement imposée comme un concept scientifique majeur, diffusé dans une multitude de disciplines - de l'écologie aux sciences humaines en passant par l'étude du système-Terre. Malgré une croissance remarquable des publications, ce champ de recherche reste relativement modeste et peine encore à trouver une définition consensuelle. Il s'enrichit néanmoins de concepts connexes comme les global systemic risks, les global catastrophic risks ou encore la notion de polycrise, même si leurs frontières et complémentarités demeurent floues. On assiste ainsi à une double maturation : celle des concepts, qui permettent désormais d'appréhender la complexité des transformations sociétales, et celle des méthodes, qui combinent analyses qualitatives et modélisations quantitatives pour éclairer les mécanismes de cette polycrise globale.

Cette évolution méthodologique est particulièrement visible dans la diversification des approches. Si les premières études s'appuyaient essentiellement sur des analyses historiques et philosophiques, l'intégration progressive des approches quantitatives et des modèles numériques a enrichi la compréhension des effondrements. Cette évolution ne marque pas tant un remplacement qu'une complémentarité féconde : les modèles, malgré leurs limites, révèlent des interactions systémiques que l'analyse qualitative peinait à identifier, tandis que les approches historiques et sociologiques donnent sens et contexte aux prédictions mathématiques. Cette hybridation méthodologique ouvre des perspectives inédites, permettant de penser notre futur collectif avec un regard renouvelé et systémique.

Ce séminaire a également montré l'implication des principales disciplines des sciences humaines et sociales. Aujourd'hui, elles convergent pour explorer les causes, risques, et conséquences des menaces, en incluant des perspectives aussi variées que les effondrements écologiques, la déplétion des ressources naturelles, la santé mentale, la spiritualité, la culture, la résilience et la régénération. Cette dynamique crée un espace d'expérimentation interdisciplinaire et même transdisciplinaire où se croisent perspectives culturelles variées (Nord-Sud global) et expertises auparavant cloisonnées.

La recherche institutionnelle joue également un rôle central dans ce domaine. Des centres comme le CSER ou le CAPAS, chacun avec ses perspectives uniques, illustrent l'éventail d'approches nécessaires pour affronter les crises mondiales. Ensemble, ces institutions tissent un réseau de réflexions et d'actions, nous aidant à comprendre l'incertitude et à la traverser avec lucidité.

Cependant, certaines voix n'ont pas pu être suffisamment représentées durant ce séminaire. Par exemple, nous n'avons pas abordé le rôle des doctorants alors qu'ils contribuent activement au renouvellement des idées. De même, les laboratoires d'idées indépendants comme l'Institut Momentum et le Post-Carbon Institute mériteraient une attention particulière, car au-delà de leurs analyses pertinentes, ils proposent des alternatives concrètes aux scénarios dominants. Des organisations comme le décrié World Economic Forum (WEF) ou la Global Challenges Foundation présentent chaque année leur rapport sur les risques globaux et des recommandations sur leur gouvernance70. Il manque encore une institution internationale comparable au GIEC pour centraliser les connaissances et informer efficacement les décideurs. Sans elle, les réponses aux effondrements écologiques et sociaux, en cours et à venir, resteront fragmentés.

L'un des aspects les plus stimulants évoqués lors du séminaire concernant les collapse studies réside dans leur potentiel émancipateur. L'effondrement, étudié par l'archéologie ou les sciences sociales actuelles, se révèle non seulement comme catastrophe mais aussi comme source d'innovation. L'étude des sociétés disparues permet d'anticiper les capacités créatives que les crises futures pourraient susciter. Une sorte d'« archéologie du futur » en gestation. Dans cette optique, on pourrait imaginer la création d'« incubateurs de collapse créatif », des espaces dédiés où des effondrements contrôlés de certains systèmes serviraient à stimuler l'innovation sociale.

Enfin, au terme de ce séminaire, il apparaît clairement que ce champ connaît une évolution vers davantage de réflexivité et de méta-analyse. Les chercheurs Les chercheurs dépassent le simple examen des faits pour interroger l'influence de leurs propres perceptions sur leurs travaux. Cette dynamique ouvre des perspectives nouvelles, permettant de combler certains angles morts et d'adopter des paradigmes plus nuancés, mieux adaptés à la complexité de notre époque. —

1Associated Press, « July ends 13-month streak of global heat records, but experts warn against relief », The Guardian, 8 août 2024.

2W.J. Ripple et al., « The 2023 state of the climate report: Entering uncharted territory », BioScience, vol. 73, n° 12, 2023, pp. 841‑850 ;

3W.J. Ripple et al., « The 2024 state of the climate report: Perilous times on planet Earth », BioScience, vol. 74, 2024, p. biae087.

4Selon deux enquêtes indépendantes publiées en mai et en juin 2024. S. Wynes et al., « Perceptions of carbon dioxide emission reductions and future warming among climate experts », Communications Earth & Environment, vol. 5, art n° 498, 2024. ; D. Carrington, « World’s top climate scientists expect global heating to blast past 1.5C target », The Guardian, 8 mai 2024.

5S. Rahmstorf, « Is the Atlantic Overturning Circulation Approaching a Tipping Point? », Oceanography, vol. 37, n° 3, 2024, pp. 16‑29.

6K. Richardson et al., « Earth beyond six of nine planetary boundaries », Science Advances, vol. 9, n° 37, 2023, p. Eadh2458. Plusieurs chercheurs proposent d'ailleurs l'ajout d'une dixième frontière : d'abord énergétique (M. Casazza et al., « The Tenth Planetary Boundary: To What Extent Energy Constraints Matter », Journal of Environmental Accounting and Management, vol. 4, n° 4, 2016, pp. 399-411), puis plus récemment la désoxygénation des océans (K.C. Rose et al., « Aquatic deoxygenation as a planetary boundary and key regulator of Earth system stability », Nature Ecology & Evolution, vol. 8, 2024, pp. 1400‑1406.)

7T. Homer-Dixon et al., « A Call for An International Research Program on the Risk of a Global Polycrisis », Cascade Institute, 16 décembre 2021.

8Seul le mot « collapse » est inclus dans cette analyse des titres et des résumés des travaux à vocation scientifique. Les concepts connexes tels que « social breakdown », « ecological/ecosystem breakdown », « failed state », « cascading failure », « global catastrophic », « existential risks », etc... ne sont pas comptabilisés dans ces statistiques. Ces références font partie d'une base de données bibliographique plus large comptant près de 10 000 références sur les transformations sociétales majeures, consultable en ligne (open source) sur collapsologie.info. La compilation et l'analyse de ces publications sont actuellement réalisées manuellement.

9D. Brozović, « Societal Collapse: A Literature Review », Futures, 2022, p. 103075.

10Voir notamment G.S. Cumming et al., « Unifying Research on Social-Ecological Resilience and Collapse », Trends in Ecology & Evolution, vol. 32, n° 9, 2017, pp. 695‑713.

11D. Steel et al., « A Dynamic Collapse Concept for Climate Change », Environmental Values, vol. 3, n° 6, 2024, p. 09632719241255857.

12G.D. Middleton, « Collapse Studies in Archaeology from 2012 to 2023 », Journal of Archaeological Research, 2024.

13R. Jung et E. Kardamaki, 2022, cité par Middleton, op. cit.

14R. Storey et G.R. Storey, 2016, cité par Middleton, op. cit.

15J. Scott, 2017, cité par Cité par Middleton, op. cit. 

16D. Brozović, op. cit.

17N.C. Laluk et J. Aguilar, « Archaeological Tropes That Perpetuate Colonialism », SAPIENS, 6 septembre 2023. 

18G.E. Shackelford et al., « Accumulating evidence using crowdsourcing and machine learning: A living bibliography about existential risk and global catastrophic risk », Futures, vol. 116, 2020, p. 102508.

19G. Middleton, op. cit.

20S. Roman, « Theories and Models: Understanding and Predicting Societal Collapse», in S. Beard et al. (éds.), The Era of Global Risk: An Introduction to Existential Risk Studies, Open Book Publishers, 2023.

21S.C. Bankes, « Agent-based modeling: A revolution? », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 99, 2002, pp. 7199‑7200. 

22J.A. Barceló et al. (éds.), Simulating Prehistoric and Ancient Worlds, Cham, Springer International Publishing, 2016 (Computational Social Sciences).

23T.A. Kohler et al., « Simulating Ancient Societies », Scientific American, vol. 293, n° 1, 2005, pp. 76‑83.

24H. Kang et al., « The potential for cascading failures in the international trade network », PLOS ONE, vol. 19, n° 3, 2024, p. e0299833

25S. Motesharrei et al., « Human and nature dynamics (HANDY): Modeling inequality and use of resources in the collapse or sustainability of societies », Ecological Economics, vol. 101, 2014, pp. 90‑10.

26Le modèle HANDY est devenu un terrain de jeu pour de nombreuses équipes qui l'ont testé de diverses manières. Voir N. Akhavan et al., « Population collapse in Elite-dominated societies: A differential equations model without differential equations », Applied Dynamical Systems, vol. 19, n° 3, 2020, pp. 1736‑1757 ; T.A.K.A. Al-Khawaja, Mathematical Models, Analysis and Simulations of the Handy Model with Middle Class, Thesis in applied mathematical sciences, Oakland University, 2022 ; M. Badiale et al., « A HANDY-type model with non renewable resources », Nonlinear Analysis: Real World Applications, vol. 77, 2024, p. 104071. ; L. Patry et al., « Modeling the effects of natural disasters, wars, and migrations on sustainability or collapse of pre-industrial societies: Random perturbations of the Human and Nature Dynamics (HANDY) model », Preprint, Arxiv, 20 juillet 2024 ; M. Shillor et al., « Analysis and simulations of the HANDY model with social mobility, renewables and nonrenewables  », Electronic Journal of Differential Equations, vol. 23, n° 1, 2023, p. 59 ; A. Tonnelier, « Sustainability or Societal Collapse: Dynamics and Bifurcations of the HANDY Model », SIAM Journal on Applied Dynamical Systems, vol 22, n° 3, 2023, pp. 1877‑1905.

27S. Roman et al., « Global history, the emergence of chaos and inducing sustainability in networks of socio-ecological systems », PLOS ONE, vol. 18, n° 11, 2023, p. e0293391.

28R. Costanza et al., « Integrated global models », in Sustainability or Collapse? An integrated history and future of people on Earth, Cambridge, MA, MIT Press, 2007, pp. 417‑446 (Dahlem Workshop Report 96).

29U. Bardi et al.Limits and Beyond: 50 years on from The Limits to Growth, what did we learn and what’s next?, Exapt Press, 2022.

30A. Nebel et al., « Recalibration of limits to growth: An update of the World3 model », Journal of Industrial Ecology, vol. 28, n° 1, 2023, pp. 87‑99.

31P. Turchin, « Toward Cliodynamics – an Analytical, Predictive Science of History », Cliodynamics, vol. 2, n° 1, 2011.

32P. Turchin, End Times: Elites, Counter-Elites, and the Path of Political Disintegration, Penguin Press, 2023.

33P. Turchin, « Political instability may be a contributor in the coming decade », Nature, vol. 463, n° 7281, 2010, pp. 608‑608.

34P. Turchin, « Editor’s Column: Launching the Journal », Cliodynamics, vol. 1, n° 1, 2010, pp. 1‑2.

35Voir par exemple L. An et al., « Editorial: Meeting Grand Challenges in Agent-Based Models », Journal of Artificial Societies and Social Simulation, vol. 23, n° 1, 2020, p. 13.

36L'analyse repose sur un corpus de 66 ouvrages publiés entre 2020 et 2024. L'ensemble des références est disponible sur la base de donnéescollapsologie.info/fr/science (mot-clé : « BOOKS »). Les critères de sélection incluent : (1) publication par des auteurs académiques, principalement chez des éditeurs universitaires, avec quelques exceptions notables d'éditeurs grand public ; (2) publication en langue anglaise. L'analyse thématique a été réalisée de manière inductive, permettant l'émergence de cinq tendances majeures, non mutuellement exclusives. Cette approche qualitative s'appuie sur l'exhaustivité présumée du corpus dans le champ étudié.

37A.Y. Glikson, The Fatal Species: From Warlike Primates to Planetary Mass Extinction, Springer International Publishing, 2021.

38A. Oliver-Smith et al. (éds.), The Angry Earth: Disaster in Anthropological Perspective, Routledge, 2020.

39B. McGuire, Hothouse Earth: An Inhabitant's Guide, Icon Books, 2022.

40C. Boukalas, Biosecurity, Economic Collapse, the State to Come: Political Power in the Pandemic and Beyond, Routledge, 2022.

41D. Short et al. (éds.), The Genocide-Ecocide Nexus, Routledge, 2021.

42T. Mulgan, Philosophy for an Ending World, Oxford University Press, 2024. 

43É.P. Torres, Human Extinction: A History of the Science and Ethics of Annihilation, Routledge, 2023.

44D.C. Sepkoski, Catastrophic Thinking: Extinction and the Value of Diversity from Darwin to the Anthropocene, University of Chicago Press, 2020.

45M. Rose, Theology for the End of the World, SCM Press, 2023.

46J.W. Perkinson, Political Spirituality in the Face of Climate Collapse: Of Monsters, Megaliths, Mules, and Muck, Springer Nature Switzerland, 2024.

47D. Short et al. (éds.), The Genocide-Ecocide Nexus, Routledge, 2021.

48E. Darian-Smith, Global Burning: Rising Antidemocracy and the Climate Crisis, Stanford University Press, 2022.

49J. Bendell, Breaking Together: a freedom-loving response to collapse, Good Works, 2023.

50J. Anderson, Being a Therapist in a Time of Climate Breakdown, Routledge, 2024.

51C. Ergas, Surviving Collapse: Building Community toward Radical Sustainability, Oxford University Press, 2021.

52Voir par exemple N. Boers, « Observation-based early-warning signals for a collapse of the Atlantic Meridional Overturning Circulation », Nature Climate Change, vol. 11, n° 8, 2021, pp. 680‑688 ; P. Ditlevsen et al., « Warning of a forthcoming collapse of the Atlantic meridional overturning circulation », Nature Communications, vol. 14, n° 1, 2023, p. 4254 ; S. Rahmstorf, « Is the Atlantic Overturning Circulation approaching a tipping point? », in EGU General Assembly Conference Abstracts, 2024, p. 22395. 

53Voir T.M. Lenton et al., « The Global Tipping Points Report 2023 », University of Exeter, 2023.

54https://risk.princeton.edu/

55https://cascadeinstitute.org/

56M.A. Centeno et al., « The Emergence of Global Systemic Risk », Annual Review of Sociology, vol. 41, n° 1, 2015, pp. 65‑85. 

57M.A. Centeno et al., « A Delusion of Control: Loss of Agency in Modern Complex Systems », Global Perspectives, vol. 5, n° 1, 2024, p. 117309.

58T. Homer-Dixon et al., « A Call for An International Research Program on the Risk of a Global Polycrisis », Cascade Institute, 2021.

59M. Lawrence et al., « Global Polycrisis: The causal mechanisms of crisis entanglement », Global Sustainability, vol. 7, n° 6, 2024.

60La publication de Kemp et ses collègues a suscité de nombreuses réactions. Voir L. Kemp et al., « Reply to Ruhl and Craig: Assessing and governing extreme climate risks needs to be legitimate and democratic », « Reply to Bhowmik et al.: Democratic climate action and studying extreme climate risks are not in tension », « Reply to Burgess et al: Catastrophic climate risks are neglected, plausible, and safe to study », « Reply to Kelman: The foundations for studying catastrophic climate risks », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 119, n° 42, 45, 49, 2022. 

61L. Kemp et al., « Climate Endgame: Exploring catastrophic climate change scenarios », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 119, n° 34, 2022, p. e2108146119.

62J.P.L. Davidson and L. Kemp, « Climate catastrophe: The value of envisioning the worst-case scenarios of climate change », WIREs Climate Change, vol. 15, n° 2, 2024, p. e871.

63D. Zimmer et al.Intersections, Reinforcements, Cascades: Proceedings of the 2023 Stanford Existential Risks Conference, Stanford Digital Repository, 2023. 

64R.D. Bressler et al., « The International Panel on Global Catastrophic Risks (IPGCR) », in D. Zimmer et al. (Eds), Op. Cit., 2023, p. 233-247.

65https://seri.stanford.edu/

66J.-P. Rivera et al., « Escalation Risks from Language Models in Military and Diplomatic Decision-Making », in Proceedings of the 2024 ACM Conference on Fairness, Accountability, and Transparency, Association for Computing Machinery, 5 juin 2024, pp. 836‑898 (FAccT ’24). 

67https://www.capas.uni-heidelberg.de/en

68https://heiup.uni-heidelberg.de/journals/apocalyptica/index

69https://www.capas.uni-heidelberg.de/en/outreach/stay-updated

70The Global Risks Report 2024, 19th Edition, World Economic Forum, 2024 ; Global Catastrophic Risks 2024: Managing risks through collective action, The Global Challenges Foundation, 2024.