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Discipline historique et collapsologie

3 novembre 2017

Une des limites à laquelle se trouve confrontée la réflexion sur un effondrement1 à venir, comme sans doute toute spéculation sur le futur, est un contraste entre la précision des données concernant les causes (par exemple des études de l’évolution des investissements dans la prospection pétrolière, une modélisation précise du changement climatique…) et la faiblesse de l’imaginaire du monde « effondré ». Souvent, ce sont des œuvres de fiction qui jouent ce rôle, avec au choix une science-fiction apocalyptique ou plus rarement l’optimisme volontariste d’un retour à la terre harmonieux. Or, il n’y a aucune raison que les scénaristes de films hollywoodiens soient plus clairvoyants dans leurs fantasmes morbides à la Mad Max que dans le délire techno-scientifique antérieur qui promettait les vaisseaux spatiaux ou les sabres laser. Une fiction réaliste est sans doute utile pour la construction d’imaginaire ou comme dystopie à fonction exploratoire dont parle Hans Jonas mais on peut, si cela est possible, lui préférer, ou du moins la contrôler, par un usage des situations historiques d’effondrements ou de crises. C’est ce travail que fournissent des auteurs comme Joseph Tainter2 sur les sociétés ayant connu un effondrement et Harald Welzer3 ou Naomi Klein4 sur les évolutions contemporaines.

Dans cet article, je vais d’abord proposer une réflexion sur les formes d’utilisation de l’histoire en collapsologie et ses limites. Je vais ensuite confronter à des données historiques nuancées et contradictoires quelques aspects d’un imaginaire culturellement dominant de l’effondrement, comme l’idée que les campagnes seront favorisées, celle de la violence et des révoltes, etc. Il s’agit de faire ressortir la pluralité des possibles et des scénarios qu’il est possible de construire, sans avoir de prétention à une prédiction précise.

I. L’usage de l’histoire en collapsologie


On peut distinguer deux grands idéaux-types extrêmes d’utilisation de l’histoire que j’appellerai ici « le modèle » et « l’analogie » :

D’un côté, des auteurs souvent issus des sciences de la nature, habitués à la connaissance de déterminismes stricts et à l’usage de modèles, vont s’employer à une « mise en courbes » de l’histoire porteuses de conclusions. Cette approche peut nous enseigner certaines données générales sur les sociétés. La cliométrie anglo-saxonne s’inscrit dans une telle démarche. On pourrait aussi citer le célèbre rapport « Halte à la croissance » des époux Meadows sur lequel j’ai écrit un article précédent5 et qui se fonde sur de nombreuses données historiques. Le travail d’Ugo Bardi6 d’adaptation de ce modèle à l’Empire romain, où les grandes variables sont la terre, l’or et le nombre de légions et suivent des courbes en cloche caractéristiques est particulièrement intéressant pour illustrer la tentative scientifique d’application d’un même modèle à des situations diverses.

De l’autre, des essayistes vont s’employer à un usage incontrôlé d’analogies à partir de ressemblances superficielles. Par exemple, l’observation de quelques similitudes entre la situation présente et celle précédent la chute de l’Empire romain7, comme une décadence supposée des loisirs (comment ne pas comparer le moment où les anciens Romains décident que les actrices dramatiques devront jouer nues avec l’essor de la pornographie et d’une publicité non moins suggestive ?) ou encore la crainte de « Barbares » qui mettent en échec la puissance militaire dominante (des légions perdues par Varus à l’Afghanistan) vont conduire à une poursuite incontrôlée de l’analogie. Si ces signes sont similaires, c’est que la situation tout entière l’est. Ou encore nous serions depuis la crise de 2007 dans une situation comparable à la veille de la Seconde Guerre mondiale : à partir de quelques similarités indéniables (tentation protectionniste, chômage, montée du populisme), on déduit que tout va se reproduire : montée des fascismes, incurie des démocraties, camps de concentration… et pourquoi pas des accords de Munich et une France Libre à l’étranger dirigée par un général mégalomane ?

Sans contester leur indéniable portée heuristique, ces deux approches présentent plusieurs limites :


La première limite à tout usage de l’histoire pour la compréhension de notre situation actuelle est le caractère radicalement nouveau de ce qu’on peut appeler « Grande accélération », « Grande mue8 » ou encore « anthropocène » : comme l’écrit l’historien John Mc Neil, il y a du nouveau sous le Soleil9. Il serait trop long d’énumérer tous les caractères de cette nouveauté radicale : développement de la technoscience, destruction accélérée de la biosphère mettant en cause le cadre même dans lequel avait jusqu’ici lieu l’histoire, unification de toute la planète dans une même « civilisation » technique et dans une même économie monde, puissance de destruction démesurée dont l’arme atomique dote les états majors, etc. Notre situation est donc incomparable avec celle de toute civilisation passée dont la base agraire restait dominante et dont les atteintes à la biosphère restaient localisées.

Une seconde limite à l’usage de l’analogie est que les phénomènes sociaux et historiques ne sont pas indépendants de leur échelle. Une île de quelques dizaines de milliers d’habitants comme l’Île de Pâques n’est pas identique à une société de plus de sept milliards d’habitants aujourd’hui presque tous intégrés dans une même mondialisation, à l’exception de quelques tribus résiduelles. Une gouvernance des « communs » dans un village n’est pas identique à la gestion mondiale de la biosphère. Autant demander à nos amis physiciens d’utiliser un ballon d’hydrogène comme modèle du Soleil.

Enfin, une troisième limite plus philosophique qui concerne surtout l’analogie est que rien ne nous permet d’affirmer a priori que l’histoire se répète. La thèse du hasard et de la contingence semble difficile à rejeter. On peut retrouver par exemple dans la révolution de 1917 de nombreuses similitudes avec celle de 1789 (famine, radicalisation progressive du pouvoir, usage de la terreur, militarisation forcée), il n’empêche que Lénine n’est pas Robespierre, que leurs avenirs différent. En toute rigueur, la seule façon scientifique de mettre l’histoire en modèle serait une forme de psychohistoire telle qu’elle est imaginée par l’auteur de science-fiction Isaac Asimov dans le cycle Fondation10 : une science mathématisée des réactions humaines qui réussit à prédire de façon statistique l’ensemble des déroulements historiques à partir de bases psychologiques. Il est évident qu’une telle science est impossible, ne serait-ce que pour des raisons mathématiques liées à la théorie du chaos. Ainsi, les modèles mathématisés appliqués aux sociétés ne doivent en aucun cas être confondus avec les modèles de la physique mais plutôt pris comme des métaphores, des aides à la compréhension, ce qui est évident pour les modèles économiques les plus simples mais peut porter à confusion pour les modèles complexes et englobant comme World3.

Malgré la qualité et l’intérêt indéniable des différents travaux que j’ai cités et de nombreuses comparaisons historiques, je pense que la conscience de ces limites est utile pour prendre une distance critique par rapport à toute prédiction précise. Il ne s’agit pas de remettre en cause les idées fondamentales qui fondent de tels modèles (le fait qu’une croissance infini basée sur des ressources et des exutoires finis ne soit pas possible est une évidence laquelle, comme le rappelle les auteurs de la mise à jour du rapport Halte à la croissance en 2003, ne doit rien au modèle mathématique) mais de mettre en garde contre une lecture prédictive stricte. Lire les dates sur les courbes des modèles, ou reporter un point futur de la situation d’effondrement est ainsi un contre-sens, de même que tenter une prédiction précise par analogie avec un moment du passé. Le lecteur peut ainsi éprouver un certain amusement à la lecture de l’excellente étude de Joseph Tainter sur un modèle général d’effondrement des sociétés complexes lorsque l’auteur écrit en 1988 qu’aucun des deux blocs ne semble concernés dans un avenir proche par un effondrement, un an seulement avant la chute du mur de Berlin et trois ans avant l’effondrement de l’URSS.

II. Retour historique sur quelques idées reçues sur l’effondrement


Une limite du « modèle » et de « l’analogie » et de s’attacher à des sociétés dans leur ensemble. Ne disposant pas du temps ou de l’expertise pour une étude d’une telle ampleur, je vais ici me contenter de m’attacher à des séries d’occurrences d’un même phénomène pour déterminer des « formes historiques» ponctuelles plus ou moins récurrentes. Il s’agit de répondre à des questions plus modérées, comme par exemple comment réagit une société en cas de famine ? Plus que de réponse, j’espère enrichir l’imaginaire de l’effondrement

Villes et campagne


Un postulat fréquent parmi ceux qui anticipent l’effondrement est qu’il vaudra mieux être dans les campagnes que dans les villes, de la « solution survivaliste » clef en main aux communautés solidaire permacoles. . J’ai eu l’occasion dans un précédent article11 de présenter quelques unes des formes de « retour à la terre » du passé et leurs difficultés. Je ne discute ici ni de l’insoutenabilité des plus grandes métropoles, ni de ce qu’une vie au vert peut avoir de souhaitable pour le loisir, l’équilibre et la santé individuelle. Je veux montrer que dans certaines situations de crise, famines ou d’effondrement, les villes peuvent présenter des avantages, tout en décrivant aussi leurs désavantages.

Villes, campagnes, famine et pauvreté


Un premier point qui apparaît est que la production de nourriture sur place n’est pas forcément un avantage.

En France, lors des grandes famines de 1693-169412, la situation des riches régions céréalières du Bassin parisien est dramatique : les réserves et jusqu’aux semences sont saisies dans les campagnes pour assurer l’approvisionnement de Paris, « mégapole » de 500 000 habitants, par un pouvoir dont la première préoccupation et d’éviter les « émotions populaires » d’une ville dont la révolte déstabiliserait la monarchie. Il en est de même pour Rouen, seconde ville du royaume avec 65 000 habitants, dont les acheteurs de grain écument la Beauce. Ainsi, à Orléans, pourtant au cœur d’une des régions les plus productrices de céréales, la famine est plus dure qu’à Paris où des ventes de pain à perte sont organisées au Louvre. Profitons de cette mention des saisies de céréales pour ouvrir une parenthèse destinée aux partisans du stockage des boites de conserve : les saisies sont fréquentes et les sanctions contre la spéculation et ceux qui stockent sont dures. À Paris, une dénonciation à conduit à la saisie des réserves des Pères de Saint Lazare qui disposaient de six ans de blé pour le redistribuer.

Dans l’ensemble, l’historien Marcel Lachiver écrit ainsi que « l’on meurt de faim plus sûrement encore dans les campagnes que dans les villes ». Même dans les périodes du moyen âge de pauvreté majoritairement urbaine, cette prédominance n’est pas en soi un indicateur en faveur des campagnes : si les pauvres se concentrent dans les villes, c’est qu’ils peuvent mieux y survivre. L’historien Bronislav Geremek écrit ainsi qu’à la fin du Moyen Âge, si les drames les plus spectaculaire ont lieu en ville, c’est dans les campagnes que sont les racines profondes du paupérisme.

L’époque contemporaine fournit elle aussi des exemples de surmortalités rurales liées à la famine. Plus près de nous dans le temps, citons la famine du Mont-Liban au temps de la Première Guerre mondiale. En 1915, cette région montagnarde et rurale d’un Empire ottoman en voie d’effondrement était déjà affaiblie par le blocus maritime des ennemis des puissances centrales et par une récolte décimée par les sauterelles. Cette zone « périphérique » pour les autorités ottomanes est en outre volontairement décrochée des circuits d’approvisionnement par le pouvoir central qui préfère concentrer le grain disponible en direction des villes et des armées. Épisode longtemps refoulé dans la mémoire libanaise, la famine du Mont-Liban fait l’objet de polémiques à propos du niveau exact de mortalité : entre un quart et la moitié de la population aurait péri selon les estimations les plus élevées. Il est en tout cas indéniable que cette famine rurale a joué un rôle central dans l’exil des populations libanaises vers les villes, exil qui ne fait que se renforcer pendant et après la Première Guerre mondiale.

À l’inverse, une considération importante pour la sécurité alimentaire des villes est que celle-ci dépend fortement des réseaux de transport disponibles et de l’existence de bassins d’approvisionnement disposant d’un surplus agricole exportable. Les hydrocarbures nous permettent aujourd’hui de nous affranchir de ces contraintes (fertilisants de synthèse et transports à bas coût). Toutefois dans un monde de déclin pétrolier, de telles questions peuvent redevenir cruciales. Autrefois, alors que le transport par terre présentait un coût rapidement rédhibitoire (dans l’Antiquité, transporter du blé par char à bœuf en double le prix tous les 100 km), seul le transport fluvial ou maritime permettait d’approvisionner massivement des grandes villes. Dans le monde ancien et médiéval, les rares villes atteignant le million d’habitants, comme la Rome impériale ou la Bagdad abbasside dépendaient du drainage des productions agricoles de vastes ères géographiques : Rome dépendait ainsi de centaines de navires pour s’approvisionner en blé d’Égypte, de Sicile et d’Afrique du Nord. En dehors de ces cas exceptionnel, la taille des villes était étroitement limitée : dans l’Europe médiévale seuls Paris et quelques villes italiennes approchaient les 100 000 habitants. Un exemple de ces questions d’approvisionnement peut être donné avec la ville de Lyon au XVIème siècle13 : l’approvisionnement régulier provient de la Bourgogne par la Saône et du bassin immédiat de la ville. Exceptionnellement, du blé peut être importé de terroirs plus lointains : Picardie et Beauce en 1504, Languedoc en 1501 puis 1573. Bien évidemment, certaines denrées de luxe peuvent être transportées sur des distances beaucoup plus grandes (épices d’Orient, …). Sans pétrole, une ville de plusieurs dizaines de million d’habitant est donc difficile à envisager. Ces approvisionnements sont aussi fragiles : lors des famines de 1693, les péniches porteuses de céréales envoyées vers Orléans par la Loire sont ainsi arrêtées de force par les habitants de Blois qui refusent de voir partir ces approvisionnements. De même, la Bretagne, à l’abri de la famine, bloque les exportations.

L’effondrement contrasté de l’empire romain permet de proposer une distinction de cas où les villes continuent à être alimentées comme ceux décrits ci dessus et de cas où elles disparaissent : L’empire, entité unique, se sépare en deux destinées distinctes : fait classique dans les effondrements étudiés par Tainter (qui se retrouve par exemple chez les Maya ou les Sumériens), une partie de l’entité politique conserve un niveau de complexité à peine inférieur et se maintient autour d’un centre secondaire avec un territoire réduit (l’empire Byzantin) avant de connaître un lent déclin tandis que le cœur de l’empire (Italie) perd brutalement en complexité. En effet, si la complexité de l’ensemble n’était plus rentable, elle peut continuer plus longtemps à l’être dans une partie plus petite, et concentrant les plus riches ressources fiscales. Le résultat est qu’en Occident, la récession urbaine déverse la pauvreté dans les campagnes alors que Constantinople voit affluer les malheureux vers ses greniers et les distributions qui y ont lieu.

Ainsi, on peut supposer en cas d’effondrement une mosaïque de régions juxtaposant des villes qui continuent à centraliser une entité de complexité restreinte par rapport à la société complexe unique que constitue depuis la chute de l’URSS notre monde mondialisé, et d’autres où les formes urbaines, incapables de maintenir la complexité nécessaire à leur existence, disparaîtraient. Les premières villes se maintiendraient en pressurant toujours davantage les ressources et les zones sous leur dépendance, dont les campagnes. Toutefois, dans notre société dont les bases ne sont plus agraires, on peut supposer

Villes, campagne et sécurité


Pour la sécurité, la vie à la campagne est de nouveau ambivalente : certes, elle apporte l’isolement à l’abri d’hypothétiques déchaînements de violence de foule mais en même temps, les villes peuvent constituer une protection collective. Lors de la famine de 1693, les révoltes sont plus souvent couronnées de succès dans les villages où la maréchaussée est presque inexistante et ou les mutins peuvent tenir plusieurs semaines : si cela peut permettre une redistribution plus juste, c’est courir le risque de débordements (cf infra) et d’une répression d’autant plus violente qu’une population réduite facilite les massacres. De plus, les hameaux vivent dans la terreur du pillage par des brigands, souvent soldats et mercenaires au chômage en rupture de solde, mieux armées et aguerris que les paysans. De telles troupes peuvent rassembler jusqu’à 80 brigands. Les villes apportent au contraire une relative sécurité du fait de l’organisation de milices défensives urbaines ou de forces armées. Elles ne sont pas pour autant exemptes de désordres : durant cette même famine ont lieu des séditions à Paris : des soldats pillent les boulangeries, bientôt suivis par le peuple. Les boulangers sont en effet particulièrement exposés aux violences. À Lyon, la foule menace le prévôt des marchands.

Durant les guerres de religion, les violences se répartissent : les événements les plus spectaculaires ont lieu dans les villes (Saint Barthélémy, siège de La Rochelle), mais les campagnes subissent durement le passage des troupes et des modestes villages peuvent subir les affrontements confessionnels (par exemple le siège du village d’Ayssènes par le duc de Joyeuse en 1586).

Dans les guerres modernes, les situations sont elles aussi variables : Les villes sont plus souvent à l’abri des exactions guerrières (les groupes terroristes comme Boko Haram commencent le plus souvent par des raids dans les zones les plus périphériques). Ainsi, tant qu’un pouvoir militaire est présent, la priorité est de défendre les villes : citons la célèbre « zone verte » de Bagdad. Toutefois, les villes sont aussi des objectifs militaires, elles sont les cibles des bombardements et peuvent se transformer en piège mortels par exemple en cas de siège, comme à Sarejevo (1992-1996) ou plus récemment à Mossoul.

En résumé, les villes sont les lieux où ils est le plus facile de conserver ou de reconstituer sécurité, pouvoir et concentration de ressources, dans le même temps elles sont dangereuses car les phénomènes d’effondrement y sont exacerbés et car leur stabilité dépend d’un pouvoir qui maintienne la sécurité.


Violences : révoltes et pillages


La violence est omniprésente et ambivalente dans les discours sur l’effondrement. D’un côté, on redoute une guerre de tous contre tous, de l’autre, certains espèrent des révoltes et des révolutions plutôt qu’un scénario d’appauvrissement général accompagné d’un durcissement de la domination des élites.

L’examen de quelques moments historiques montre qu’il faut se garder de toute lecture mécaniste qui lierait nécessairement le passage sous un seuil de subsistance et l’émergence de révoltes. Ainsi, de nombreuses famines meurtrières n’ébranlent pas l’organisation politique du pouvoir d’Ancien régime. Ainsi, les famines de 1693 et 1706 coïncident avec le sommet de la puissance du pouvoir monarchique en France (le règne du roi Soleil Louis XIV) et les quelques cas de violence évoqués ci dessus demeurent modérés : Dans l’ensemble, plusieurs millions de personnes meurent de faim sans protester. De même, les terribles famines irlandaises du XIXème siècle, malgré la disparition de près de la moitié de la population, ne suffisent pas à faire rejeter la domination anglaise.

Pour autant, contre une historiographie marxisante pour qui révoltes et révolutions ne furent possible en occident qu’à partir des lumières et du développement d’une conscience de classe bourgeoise auparavant rendue impossible par la prégnance de l’idéologie monarchique et de la religion chrétienne, les révoltes étaient fréquentes dans les périodes de difficulté du Moyen Age14. C’est en particulier le cas à la fin du XIVème siècle où le souvenir des années favorables de 1350-1360 rend d’autant plus terrible la frustration liée à une nouvelle misère. On peut d’ailleurs supposer que plus que les conditions objectives, c’est leur dégradation qui produit une conscience de la misère, et donc de possibles révoltes par comparaison. Ces révoltes se font dans un contexte de multiplication de rumeurs qui disent que les « menus gens » extermineront les puissants. Ces révoltes populaires sont hélas souvent récupérées par des démagogues qui manipulent les pauvres ou par des prédicateurs. Ainsi, à Florence, le tumulte des Ciompi est récupéré par Salvestro di Medici, à Paris en 1357, les « Jacques » envahissent les palais et sont menés par Étienne Marcel, choisi comme chef car « bien parlant et bien sachant ». Les émeutes se développent par effet d’entraînement sur les badauds, font jouer les solidarités de métier puis tombent souvent dans la violence : destruction, incendies, sévices… Les pauvres sont « noyautés » par des truands : les éléments les plus violents, comme des détenus libérés des prisons par l’émeute sont cause de violence et de la mauvaise image ultérieure des révoltes : ainsi les termes de « vilain Jacques » ou de « Maillet » restent des insultes longtemps après la révolte qui porta ce nom. Une des faiblesses de ces révoltes est la brièveté des liens induits par une commune pauvreté.

Outre les populistes, les révoltes produisent souvent un déchaînement des eschatologies religieuses, du messianisme de Joachim de Flores conduisant à la révolte des Pastoureaux à la mise en place d’une véritable commune instaurant la pauvreté fraternelle par les Hussites de Prague en 1419. Ce rêve apostolique de Jean Hus, organisé et discipliné, a tenu tête à cinq croisades menées par les religions dominantes. Loin d’être un effet imprévisible et anormal d’une évolution qui aurait du mené vers la démocratie (c’est à dire vers le capitalisme libéral pro-occidental) comme voudraient le présenter les média, le tournant fanatique religieux des révolutions du « printemps arabe » des années 2010 comme de la révolution de 1979 s’inscrit ainsi dans une longue tradition. Autant dire que ce retour à l’intransigeance religieuse n’est pas une spécificité liée à une quelconque essence de « l’Islam » mais un phénomène qu’on peut s’attendre à retrouver (pensons à la résurgence des sectes protestantes aux États-Unis).


Dette et servitude


Si la question des dettes, ou plus souvent de la dette, réduite à la dette publique (alors que dans la plupart des pays développés, la dette des ménage et des entreprises est considérablement supérieure à la dette publique) est omniprésente dans les débats politique de notre temps, un aperçu historique tend à montrer que les périodes de crises graves la dette peut prendre une signification bien plus terrible. Ainsi, en période de récession ou d’effondrement, le fait que les dettes ne soient jamais remboursables n’empêche pas les créanciers de continuer à agir pour les recouvrer, quitte à utiliser l’intimidation et à faire tomber les débiteur dans diverses formes de servitude.

Dès l’Antiquité, une des principales revendications obtenues par le peuple lors des réformes démocratiques comme celle de Solon à Athènes était l’abolition de l’esclavage pour dette qui faisait tomber définitivement dans une dépendance absolue envers le créancier.

La spirale de l’endettement paysan se retrouve dans la plupart des sociétés rurales. Outre les formes les plus flagrantes d’usure (les taux d’intérêt demandés sont considérables, avec des taux de 25 ou 50% que l’essor présent du microcrédit revolving nous montre qu’ils n’appartiennent pas qu’à l’histoire) la forme même de l’endettement paysan cache une usure déguisée15. Ainsi, l’emprunt se fait pour la soudure ou les semences, en mai, moment où le prix du grain est au plus haut, alors que le remboursement a lieu au moment de la récolte, c’est-à-dire lorsque les grains sont abondants et peu chers. Ainsi, si en monnaie, l’emprunt se fait sans intérêt, exprimé en grain, il est très lucratif pour le prêteur qui dispose de la marge et du numéraire suffisant pour un stockage spéculatif. Les formes du crédit sont multiples : hypothèque, constitution de rentes foncière qui en aggravant les prélèvements accélèrent souvent la ruine et le départ. La forme de crédit la plus pernicieuse est le mort-gage, forme d’hypothèque dans laquelle le débiteur cède au créancier l’usufruit du bien placé en garanti, rendant ainsi illusoire tout espoir de remboursement de la part d’un homme qui ne peut même plus cultiver sa terre.

Le moment crucial d’entrée dans la misère est alors le déguerpissement : le moment où le tenancier, acculé, choisit de fuir sa terre pour partir sur les routes. Certains doivent vendre jusqu’aux objets courants du ménage et sont parfois acculés au suicide. Rappelons les nombreux suicide actuels des paysans indiens ou l’exode rural massif vers les bidonville des paysanneries de nombreux pays du tiers monde.

Agriculture


L’agriculture est l’objet de spéculations diverses, dans l’ensemble, les collapsologues s’entendent sur l’idée que l’agriculture va devoir reprendre une place plus importante dans nos vie et nos sociétés. Pablo Servigne parle dans son ouvrage Nourrir l’Europe en temps de crise16 d’un retour à deux tiers d’agriculteurs. J’ai entendu ou lu au cours du temps des affirmations diverses et contraires : pour certains, on pourrait nourrir une ville comme Paris par l’agriculture urbaine avec des bacs d’ « incroyables comestibles » et en cultivant les parcs, ou alors il suffirait d’un potager en permaculture pour atteindre son autonomie alimentaire sans trop de difficultés, pour d’autres, des chiffres de 95% de la population dans l’agriculture sont affirmés.

L’histoire de l’agriculture permet de faire ressortir quelques faits et contraintes. Une première contrainte est la nécessité d’un régime alimentaire équilibré. Ainsi, si un maraîchage bio en permaculture peut aujourd’hui être très rentable et permettre sans trop de difficultés de fournir en fruits et légume une famille avec un potager, il ne couvre qu’une part des besoins alimentaires. Le cœur de la plupart des systèmes agricoles de l’histoire est une association céréale / légumineuse / légume (+ une plante textile). Par exemple en Mésoamérique l’association Maïs / courge, en Asie du Sud Est l’association riz / soja / choux, ou pour le foyer moyen oriental et méditerrannéen orge-blé / lentilles / salade et poireaux. Or, les néoruraux des années 1970 l’ont découvert souvent à leur dépend, la culture de céréales pour une alimentation complète est autrement difficile que faire pousser ces légumes, qui rappelons le sont faiblement caloriques.

Une contrainte plus fondamentale est la nécessité de renouveler la fertilité des terres agricoles. En effet, la récolte extrait du sol des réserves des principaux éléments minéraux : azote (nitrates), phosphore (phosphates), potassium, mais aussi magnésium, Fer, sodium… qu’il est nécessaire de fournir en retour au sol sous peine de l’épuiser en quelques années. Au cours de l’histoire agricole, se sont succédés plusieurs systèmes17 permettant ce renouvellement, parmi lesquels on peut citer:

Système de culture sur abattis brûlis dans une forêt où quelques parcelles sont défrichées chaque année pour être utilisées un ou deux ans avant de laisser la forêt naturelle renouveler la fertilité du sol (en érodant la roche mère et par l’accumulation d’humus), ce système de bon rendement mais n’utilisant qu’une faible partie du terroir chaque année ne peut supporter que de faibles densités de population.

Système de culture méditerranéenne antique où les nutriments sont drainés sur un vaste domaine pastoral (saltus) par un bétail qui les restitue par ses déjections aux terres cultivées (ager) grâce à un parcage de nuit sur les champs.

Système de culture attelée lourde médiéval associant coupe de foin, stabulation du bétail et fabrication de fumier avec une rotation à jachère où le fumier est incorporé au sol grâce au labour.

Système sans jachère de l’Europe Moderne, support agricole et démographique de la révolution industrielle, où la culture de légumineuses et de fourrage permet la fixation de l’azote dans le sol.

Ces systèmes ont permis successivement d’augmenter les rendements agricoles dans des proportions importantes longtemps avant l’émergence d’une agriculture industrielle.

Dès l’antiquité, des engrais extérieurs ont pu être apportés aux sols : sédiments azotés en Égypte, guano au Pérou… Mais depuis le début du XXème siècle, l’usage d’engrais minéraux fossile ou de synthèse (azote produit par le procédé Haber-Bosch à partir de gaz) est devenu massif est a permis de multiplier les rendements et la population. Ils sont aujourd’hui devenus indispensables au maintien de la fertilité de sols utilisés de façon très intensive, et donc à notre agriculture. Or, les mines de phosphore et de potassium s’épuisent, de même que les hydrocarbures nécessaire à l’azote. De plus, dans un monde en effondrement, il deviendrait difficile de soutenir les vastes infrastructures qui permettent leur approvisionnement mondial. Le problème du renouvellement de la fertilité est encore aggravé par ce que Marx appelé la « rupture métabolique » : ainsi, alors que dans les systèmes agricoles traditionnels les nutriments consommés étaient pour une grande part rejetés (sous forme d’excréments, de déchets de culture…) sur place, aujourd’hui ils sont massivement exportés vers des villes lointaines où ils sont perdus définitivement vers la mer ou pollués dans des boues d’épuration mélangées de pathogènes, de métaux lourds et de produits chimiques divers. La valorisation des résidus de culture (biocarburant, isolation, plastiques biosourcés) aggrave encore ce problème, car c’est autant de matière retirée à des sols qui s’épuisent. Il sera donc nécessaire de « boucler la boucle » de nouveau. Jusque il y a moins d’un siècle, les gens se précipitaient pour récupérer le crottin des chevaux dans les rues : les rues parisienne étaient une source d’engrais prisée.

Inversement, on peut noter que l’agriculture « low tech » hautement productive développée dans l’Europe du XIXème siècle offrait des rendements élevés qui auraient pu nourrir une population aux deux tiers non agricole sans recourir ni aux engrais de synthèse, ni à la motorisation, ni à la chimie. En effet, l’association d’un système de culture sans jachère avec stabulation et d’une traction animale dotée de machines agricoles produites par l’industrie naissante permettait des rendements très élevés. Par exemple, le brabant réversible en acier permettait de diviser par entre deux et quatre le temps nécessaire au labour par rapport à la charrue ancienne. De même pour des outils comme la faucheuse à barre de coupe horizontale mues par les roues lorsque le cheval la tracte. Ou encore les tarares et batteuses qui permettent un gain de temps énorme par rapport à des opérations réalisées à la main, au tamis ou au fléau. Ces vieilles machines à traction animale, que l’on voit encore abandonnées dans nos campagnes, ont connu le maximum de leur diffusion en 1955 (!) avant d’être dépassée par l’essor du tracteur. Ce système agricole n’a jamais connu sa pleine diffusion.

L’épuisement des sols a eu lieu de nombreuses fois dans l’histoire. Parmi les formes les plus poussées, on peu citer la désertification produite par la salinisation liée à l’agriculture irriguée du « croissant fertile » aujourd’hui désert stérile, la dégradation des sols en Grèce archaïque, ou plus récemment la Dust Bowl des années 1930 aux États-Unis. Un tel phénomène a actuellement lieu dans de nombreuses régions du monde. Selon Marcel Mazoyer l’agriculture sur abattis brûlis a contribué de façon décisive à la désertification du Sahara et du désert Persique. De tel phénomène ont joué un rôle crucial dans plusieurs effondrement de civilisation, comme en Mésopotamie18 ou dans les basses terres Mayas.

Précisons que je restreint mon sujet à l’éclairage historique, mais qu’il serait possible de discuter de divers facteurs favorables (permaculture comme agriculture écologiquement rationnelle, amélioration des variétés et des connaissances agronomiques…) et défavorables (réchauffement climatique, mort biologiques des sols…) qui influeraient sur une agriculture d’un effondrement futur.


Pauvreté et condition humaine


Revenons pour finir sur les conditions de vie du peuple, de la vaste majorité de la population au cours de l’histoire, hélas souvent moins connues que celles des élites : pour les romains, on s’imagine les thermes, des banquets, le théâtre bien plus que la vie quotidienne d’un colon attaché à la terre du bas-empire. Souvent le constat est le même, les conditions de vie dans les époques les plus brillantes sont mauvaises. Prenons le siècle des Lumières, le règne du roi Soleil, l’apogée de la culture de cour et de la littérature classique : La population vie d’une vie rude, précaire, à la merci des maladies et des famines récurrentes, dans des maisons au sol de terre battue. L’alimentation, basée sur une tranche de pain sec (la soupe) trempée dans un potage d’herbes et de légumes de saison, parfois égayée, pour les plus riche, par un peu de gras de lard ou d’huile d’olive. L’historien Marcel Lachiver insiste ainsi sur le fait que le porc familial est un mythe et que la majorité ne consommait guère de viande hors d’occasion exceptionnelles (mariage). Cette alimentation est souvent déséquilibrée : le manque de lipide et de graisse rend sujet au froid, le manque de vitamine au rachitisme, au scorbut et au pellagre. Les infections, maladies de peau, parasites sont la norme. Un homme sur deux meurt avant 10 ans. Notons d’ailleurs qu’il en résulte une espérance de vie faible, de 25 ou 30 ans, mais que celui qui a survécut à la petite enfance peut raisonnablement espérer vivre jusqu’à 50 ou 60 ans. On note quelques rares centenaires. Lors des famines, les racines amères et les herbes remplacent le pain, certains vont jusqu’à faire du pain de fougère et on retrouve des moribonds qui se sont nourris d’herbes. Au Moyen-Âge, Guillaume d’Auvergne distingue la faim tenaillante et animale de la voracité qui fait se jeter sans discernement sur toute nourriture.

Certains, la religion aidant, pouvaient pourtant choisir la pauvreté, comme en témoigne la vigueur sans cesse renouvelée des diverses formes d’érémitisme et d’ordre mendiant tout au long du Moyen-Âge, ou encore dans un contexte tout à fait différent la retraite solitaire des Sannyasin Hindous. Ainsi, les ermites partaient au « désert » vêtus de peau de bête, se nourrissant d’herbes et de glands, de bouillies, de fruits sauvage, pour imiter le Christ. Ce qui n’empêcha pas Pierre l’Ermite de devenir centenaire.

Notons enfin que les conditions de vie des chasseurs cueilleurs qui ont représenté la grande majorité de l’histoire de l’humanité semblent souvent nettement meilleures que celle des pauvres de sociétés agricoles : vie plus longue, meilleur état de santé comme le révèle la paléoanthropologie, temps de travail faible et sociétés relativement égalitaires19. Les effondrements du passé ont ainsi pu se traduire pour les populations pauvres et marginalisées par une amélioration des conditions de vie. Ainsi, les colons et paysan pauvres de la fin de l’Empire romain d’Occident ont souvent accueillis les barbares et fraternisé avec eux pour se libérer de la lourdeur des impôts et du joug impérial, progressivement durci au cours de siècles.

La leçon est alors ambivalente : d’un côté, l’homme du présent ne peut manquer d’être horrifié par de telles conditions de vie. De l’autre, ce sont là nos ancêtres, des hommes et des femmes qui ont vécu avec leurs joies et leur peines, leurs réconforts, leurs fêtes. Il y avait de l’amour, du rire, des satisfactions. La littérature populaire, les contes, ne reflètent pas le désespoir mais une vie qui valait la peine d’être vécue, refletée par la joie des Goliards, Fabliaux, de la comédie populaire. En dehors de quelques philosophie radicalement pessimiste comme le premier Bouddhisme pour lequel la vie terrestre est radicalement condamnée à la douleur, la plupart des sagesses et des religions anciennes ne font pas preuve du pessimisme radical de nos nihiliste modernes. Quelques soient les reculs dans le confort consumériste de notre temps, et tant qu’il y aura des survivants, il semble ainsi que la vie continuera à valoir la peine d’être vécue.

1Les lecteurs qui ne seraient pas familiarisés avec l’idée d’un effondrement proche de la société industrielle peuvent se référer à l’article Wikipédia sur « L’effondrement de la civilisation industrielle » ou à l’ouvrage de synthèse de SERVIGNE, Pablo et STEVENS, Raphaël, Comment tout peut s’effondrer, Seuil, 2017

2TAINTER, Joseph, L’effondrement des sociétés complexes, La Fenderie, Le Retour aux Sources, 2013 (1988) l’auteur, archéologue de formation, insiste particulièrement sur les cas de Rome, des Mayas et des Chacoans d’Amérique du Nord.

3WELZER, Harald, Les guerres du climat, Paris, Folio, 2007

4KLEIN, Naomi, La stratégie du choc, Vers un capitalisme du désastre, Arles, Acte Sud, 2013

5 Voir « Brève introduction au rapport Meadows, “The Limits to Growth” », 2016 sur le site internet de l’association Adrastia.org

6BARDI, Ugo, « Peak civilization, The fall of the roman empire », 2011 sur le site internet www.financialsense.com

7Par exemple ENGELS, David, Le Déclin, Paris, éditions du Toucan, 2013. Le travail de synthèse sur certains aspects de l’histoire romaine réalisé par cet historien Belge est d’un grand intérêt, on peut regretter qu’il néglige fortement les facteurs environnementaux et un lien entre les mœurs, la culture et l’évolution politique inspiré de Toynbee ou Spengler que Joseph Tainter (op. cit.) range dans la rubrique des explications « mystiques » de peu de valeur des l’effondrements. De plus, ces conclusions sur le devenir impérial de l’UE peuvent sembler douteuses.

8 Terminologie du pionnier de l’écologie Bernard CHARBONNEAU

9MC NEIL, John, Du nouveau sous le soleil, Une histoire de l’environnement au XXème siècle, Seyssel : Champ Vallon 2010

10ASIMOV, Isaac, Fondation, Hachette, 1957

11AUTARD, Jean, « Une histoire des alternatives néorurales depuis le XIXème siècle », publié sur le site internet Adrastia.org

12Pour toutes les analyses sur les famines de 1693 et 1704, voir LACHIVER, Marcel, Les années de misère, La famine au temps du Grand roi, Paris, Fayard, 1991

13Hamon, Philippe, 1453-1559 Les Renaissances, Histoire de France sous la direction de Joëlle Cornette, , chapitre 4 « Le Beau XVIème siècle, Structures et conjonctures »

14MOLLAT, Michel, Les pauvres au Moyen-Âge, Paris, Hachette, 1978

15ANTOINE, Annie, BOHELER, Jean-Michel et BRUMONT Francis, L’agriculture en Europe occidentale à l’époque moderne, Paris, Belin, 2000

16SERVIGNE, Pablo, Nourrir l’Europe en temps de crise, Vers des systèmes alimentaires résilient, Actes Sud, 2014

17MAZOYER, Marcel et ROUDART, Laurence, Histoire des agriculture du monde, du néolithique à la crise contemporaine, Paris, Seuil, 1997

18TAINTER, op. cit.

19On peut citer à ce sujet les ouvrages classiques de SAHLINS, Marshall, Âge de Pierre, âge d’abondance, Gallimard, 1976 de CLASTRES, Pierre, La société contre l’état, édition de minuit, 1974 et les textes de DIAMOND, Jared sur l’agriculture comme plus grande catastrophe de l’histoire humaine.

Par Jean Autard, ENS Ulm, jean.autard@ens.fr, septembre 2017.